Les enfants exposés à la violence conjugale
La violence conjugale ne laisse aucun enfant indemne
Dans un climat familial marqué par la violence conjugale, l’enfant n’est pas un simple témoin passif des faits graves se déroulant à son domicile : il en subit directement les effets.
Cela peut avoir des conséquences lourdes sur son développement physique, psychique et affectif, et ce dès le début de la grossesse. De plus, de nombreux enfants sont eux aussi un jour ou l’autre directement victimes de maltraitances.
Les enfants exposés aux violences conjugales voient, entendent des scènes qui vont de la violence verbale à l’agression sexuelle ou physique. Même s’ils se trouvent à l’étage, au lit où ils essaient de s’endormir, ils imaginent la scène en train de se dérouler. Ils peuvent également constater les résultats de la violence.
Dans de nombreux cas, les enfants victimes de cette situation demeurent les victimes ignorées. L’exposition des enfants est souvent sous-estimée par les parents. Du côté des professionnels, les problèmes peuvent être mal diagnostiqués, le traumatisme et le préjudice psychologique subis par les enfants peuvent être mal compris ou minimisés.
Effets de l’exposition à la violence conjugale sur le développement des enfants
L’état actuel des connaissances ne laisse plus aucun doute sur l’impact de la violence conjugale sur les enfants. Dès la vie intra-utérine, les violences conjugales ont un impact sur développement et le bien-être physique, psychologique, affectif, relationnel et social des enfants (variable selon le degré d’exposition, l’âge et le sexe de l’enfant).
De telles expériences créent de graves traumatismes chez les enfants et adolescents et entraînent de sérieuses difficultés sur les plans affectifs, cognitifs et comportementaux.
Bien que chacun réagisse, s’adapte ou traverse le traumatisme lié à l’exposition aux violences conjugales de manières différentes, tous ces enfants ont vécu à un moment donné dans un climat d’insécurité, de peur, d’irrationnel et de non-dits. Cela a des répercussions en termes de développement (difficultés à identifier et gérer leurs émotions, angoisses, insécurité, agitation ou inhibition…), et dans la relation à l’autre (banalisation de la violence, comportements à risque, isolement ou agressivité excessive, perte de confiance dans l’adulte).
Les impacts décrits ci-dessous1 par catégorie d’âge ne sont pas spécifiques de l’exposition à la violence conjugale mais peuvent être des symptômes observés dans un contexte de violence conjugale :
• Bébés (0-2 ans) : retard staturo-pondéral, retard du développement, perturbation des habitudes d’alimentation et de sommeil, inattention, gémissements, pleurs excessifs etc.
• Enfants de 2 à 4 ans : énurésie, anxiété, cauchemars, dépendance exagérée à l’égard de la mère, symptômes du syndrome de stress post traumatique, actes de destruction des biens, actes d’agression, de destruction de biens etc.
• Enfants de 5 à 12 ans : plaintes somatiques, faible estime de soi, anxiété, dépression, repli, agressivité, comportements oppositionnels, mauvais résultats scolaires, manque de respect à l’égard des femmes, conviction stéréotypées à l’égard des rôles hommes/femmes etc.
• Adolescents (12-18 ans) : problèmes somatiques, manque d’estime de soi, désertion du foyer, abus d’alcool ou de drogues, délinquance, décrochage scolaire, violences à l’égard des personnes qu’ils fréquentent, manque de respect à l’égard des femmes, convictions stéréotypées à l’égard des rôles hommes/femmes etc.
Inspiré de « les enfants exposés à la violence conjugale et familiale : guide à l’intention des éducateurs et des intervenants en santé et en services sociaux » de Sudermann M. et Jaffe P.
Photo by Mael BALLAND on Unsplash
Conséquences des violences conjugales sur les enfants et la relation mère-enfant
La grande majorité des enfants exposés à la violence conjugale ont conscience de ce qui se passe entre leurs parents et « s’adaptent » à la situation au détriment de leur bon développement. Qu’il y ait de la violence physique ou pas, il règne toujours une atmosphère de peur, d’anxiété, de colère, de tension et de non-dit au sein du foyer. Ils vivent en étant en permanence dans la crainte d’un accès de violence.
Ces enfants, quel que soit leur âge, vivent tous des situations émotionnelles complexes, marquées par des sentiments contradictoires : ils ont souvent peur pour leur mère et redoutent en même temps de voir leur père en prison ou leurs parents séparés, ils peuvent être en colère après le père violent, mais aussi après leur mère s’ils adhèrent au discours paternel justifiant les violences, ils peuvent parfois se sentir responsables lorsque les questions éducatives servent de prétexte au déclenchement des violences et développent alors une forte culpabilité. Pris dans ces contradictions, on observe fréquemment chez ces enfants une attitude de banalisation de la violence et des difficultés à identifier et gérer les émotions.
La relation mère-enfant est également affectée par le climat de violence. Les femmes victimes de violence doivent souvent mobiliser beaucoup de ressources pour supporter la situation et éviter les accès de violence de leur compagnon, au détriment de l’attention qu’elles pourraient porter à leur enfant. Le fait d’être constamment critiquée et dévalorisée devant les enfants, tout en devant parfois faire face à des injonctions paradoxales, nuit à l’élaboration d’une relation mère-enfant basée sur la confiance et le respect : la mère peut avoir du mal à s’imposer et à poser des limites claires à son enfant dans un tel contexte, l’enfant peut adopter lui aussi des conduites agressives vis-à-vis de sa mère. Le lien mère-enfant est quoi qu’il en soit marqué par l’insécurité tant que les violences perdurent. Cela ne traduit pas une défaillance de la mère, mais c’est une conséquence directe des violences conjugales.
Accompagnement des enfants à Solidarité Femmes Besançon
Il est très important que les enfants soient autorisés à parler de ce qu’ils vivent et de leur rappeler l’interdit de la violence.
Solidarité Femmes Besançon propose différentes modalités d’interventions aux familles que nous hébergeons : des temps d’accueil spécifiques pour les enfants, des entretiens individuels avec les mères et des activités mère-enfant. Il s’agit de proposer un espace de parole ou d’expression pour chacun.
Nous travaillons également en partenariat avec divers services de prise en charge des enfants lorsque cela est nécessaire (centre de victimologie, relais parental, centre de guidance infantile, maison de l’adolescent etc.).
Image parDaniel Nebreda de Pixabay
Liens
Fédération Nationale Solidarité Femmes
La Fédération Nationale Solidarité Femmes est un réseau regroupant depuis plus de 25 ans, les associations féministes engagées dans la lutte contre toutes les violences faites aux femmes, notamment celles qui s'exercent au sein du couple et de la famille.